Artistes et producteurs français s'entendent sur une rémunération minimale du streaming

Enfin ! Après + de 10 ans de gavage sans foi ni loi...

Les organisations d'artistes-interprètes et de producteurs phonographiques français sont parvenus à un accord sur une rémunération minimale des artistes dans le cas particulier du streaming¹. Coté artistes, cet accord, revendiqué comme “historique”, a été négocié par l'Adami, la Spedidam et plusieurs syndicats d'artistes².Côté producteurs, il a été signé par le SNEP, l'UPFI, le SMA, la SCPP et la SPPF. Il intervient in extremis, au terme du délai de 12 mois que le gouvernement avait accordé aux représentants des artistes et des producteurs pour s'entendre sur cette question, par ordonnance du 12 mai 2021.
En raison de désaccords persistants des parties, l'accord conclu ne porte pas sur la vidéo ou les podcasts, qui peuvent intégrer des enregistrements musicaux. Son champ d'application ne s'étend pas non plus aux exploitations relevant d'une gestion collective obligatoire, comme les webradios linéaires ou semi-interactives, mais se limite au streaming interactif (diffusion à la demande) des enregistrements.
Des taux de royalties minimum
Aux artistes principaux sous contrat d'artiste, l'accord conclu accorde une garantie de rémunération minimale sous la forme d'un taux de royalties dont l'assiette s'étend à tous les revenus perçus des plateformes par les producteurs, y compris les reliquats d'avances non recoupables, qui ne sont pas attribuables à des ayants droit précis faute de correspondre à de réelles exploitations – ce qu'on appelle le “breakage”.
Lorsque le producteur est son propre distributeur, ce qui est le cas des majors, il doit garantir à l'artiste un taux de royalties minimum de 11 % en période d'abattements, ces derniers ne pouvant avoir pour effet de réduire de plus de 50 % le taux prévu au contrat. En dehors de la période d'application d'éventuels abattements, le taux minimum garanti est fixé à 10 %.
Lorsque le producteur n'est pas son propre distributeur, ce qui est le cas des labels indépendants, le taux minimum garanti est fixé à 13 % en période d'abattements, et à 11 % une fois que ces derniers ne sont plus appliquables. En cas de contrat de licence exclusive entre l'artiste et le producteur – lorsque l'artiste finance lui-même la réalisation du master -, le taux minimum garanti, qui ne peut souffrir d'abattements, est fixé à 28 %.
Une avance minimale de 1000 € brut par album
L'article 4 bis de l'accord signé par les parties prévoit par ailleurs le paiement par le producteur d'une avance minimale de 1000 € brut à l'artiste par album inédit, qu'il pourra recouvrer sur ses revenus futurs. Lorsque le producteur est une très petite entreprise – moins de 10 équivalents temps plein et moins de 2 M€ de chiffre d'affaires -, le montant de cette avance minimale est ramené à 500 €, la mesure ne devenant contraignante pour les TPE que trois mois après l'entrée en vigueur de l'accord.
Pour faciliter la mise en œuvre de cette garantie par les TPE, les organismes de gestion collective de producteurs (SPPF, SCPP) se sont engagés à mettre en place d'ici là un dispositif de soutien spécifique aux petites structures, les incitant à verser une avance minimale supérieure à 500 € et prévoyant la prise en charge, “s'ils en ont la capacité”, d'au moins 50 % de cette avance.
Le principe de cette avance minimale se double d'une rémunération forfaitaire fixée à 2 % du cachet de base par minute d'enregistrement pour les artistes principaux, et à 1,5 % pour les artistes accompagnateurs (musiciens, choristes, etc.) ayant contribué à l'enregistrement.
Une rémunération forfaitaire complémentaire
Une rémunération forfaitaire complémentaire sera versée aux artistes accompagnateurs en cas de succès de l'enregistrement au cours des 50 ans qui suivent sa première commercialisation : de 20 % du cachet de base à 7,5 millions d'écoutes certifiées en France ; de 25 % à 15 millions d'écoutes ; de 30 % à 30 millions d'écoutes ; de 35 % à 50 millions d'écoutes et tous les 50 millions d'écoutes supplémentaires par la suite.
A défaut de faire sauter le plafond de verre du streaming, qui ne génère des revenus conséquents que pour une minorité d’artistes, les nouvelles garanties accordées aux artistes-interoprètes peuvent mettre en difficulté certains petits labels. Parmi les représentants des organisations de producteurs signataires, Mathieu Dassié, du SMA (Syndicat des musiques actuelles), qui représente essentiellement des TPE du secteur, a apposé sa signature “sous réserve de la mise en place effective du dispositif de soutien au bénéfice des très petites entreprises dans les délais et les conditions prévues à l'article 4 bis”.

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